Vincent Charbonnier |
Ce célèbre texte de Marx, rédigé en 1845, est un des plus petits
documents philosophiques
:
soixante-cinq lignes, distribuées en onze «thèses», dont la plus longue compte
treize lignes et la plus brève, une ligne et demie. À quoi attribuer sa fortune
? Il en va de ces notes
comme des aphorismes de Nietzsche ou des Carnets de Valéry
: le regard étranger
découvre, dans l’apparente spontanéité de l’écriture, dans sa déconcertante
concision, sa propre disponibilité et comme une invite à la libre coproduction
du sens.
Marx, en réalité, règle ses comptes avec ce qu’il appelle sa
«conscience philosophique d’autrefois
».
Il refuse désormais de se contenter du rôle de spectateur. Il voit dans ce
qu’il regarde autour de lui, des besoins et des projets, du travail et de
l’imagination, qui renvoient à une économie, à une culture, à une histoire,
c’est-à-dire à une société déterminée.
Ce livre nous fait pénétrer au sein du laboratoire de Marx,
au moment où il engage une révolution théorique qui n’a pas fini de faire
parler d’elle, ainsi qu’en témoigne le retentissant, perdurable et quasi
obsessionnel écho de la 11e thèse sur Feuerbach
: «
Les
philosophes ont seulement interprété différemment le monde, ce qui importe,
c’est de le changer.
»